L’histoire
Goncourt des lycéens
Nous avions reçu il y a quelques années un enseignant dynamique Bamiléké, il nous avait parlé de sa civilisation originale basée sur les chefferies, nous y avions appris que la pauvreté était surtout présente dans les campagnes et que la moitié de la population n’avait pas accès à l’eau potable et au raccordement électrique.
Née dans l’extrême nord du Cameroun, l’auteure Djaïli Amadou Amal est peule et musulmane. Mariée à 17 ans, elle a connu tout ce qui fait la difficulté de la vie des femmes au Sahel. Elle aborde la question hélas éternelle de la violence faite aux femmes.
Le roman se situe dans une société qui paraît aisée et civilisée, mais cette bourgeoisie est aussi patriarcale que le reste de la société.
Certes les femmes mangent à leur faim, sont couvertes de bijoux, signe de prestige pour l’homme mais elles ne sont que des marchandises qui servent de monnaie d’échange pour sceller des alliances commerciales, elles sont souvent traitées moins bien que des bêtes qui elles, bénéficient parfois d’affection.
Vendues ou mariées à des maris qui ont tous les droits sur elles. Au nom d’Allah tout est permis, elles sont battues, violées, insultées, répudiées.
Quand elles montrent le moindre signe de rébellion c’est la punition immédiate, les laissant parfois aux portes de la mort.
Cette société prend fait et cause pour le mari, surtout pas de scandale, et ce mot qui revient pour que les femmes acceptent, excusent.
-Munyal, munyal, patience, patience- Un alibi servi aux femmes par leurs propres mères face aux abus physiques et psychologiques qu’elles vont devoir subir. Il faut se soumettre à la volonté des hommes.
Au joug masculin s’ajoute les rivalités entre femmes. Lorsque son mari devient polygame, la première épouse recluse dans la concession de son mari doit veiller à rester la première afin de protéger ses propres enfants. C’est que dans ces concessions, vit une famille élargie où se côtoient frères, oncles, cousins, un véritable nid de vipères où seul l’homme décide.
Le même jour, dans la riche famille Boubakari, on marie deux jeunes filles.
Le roman est diffracté en trois parties :
-Ramla dont on a rompu les fiançailles pour la donner en seconde épouse à un associé de son père.
-Sa demi-sœur Hindou devient la femme de Moubarak, son cousin, ivrogne, drogué et paresseux qui lui a promis la punition de son insolence et de son indifférence.
-Safira, est la première épouse, elle doit accepter l’arrivée de Ramla, elle a trente cinq ans, toujours très belle, mais illettrée, elle a six enfants, et voilà qu’arrive le moment où elle doit céder la place à une plus jeune. Elle nous confie ses stratagèmes face à la jeunette que lui préfère son époux.
Néanmoins, elle reste la -daada-saaré-, la première épouse à laquelle la seconde devra se soumettre.
A tour de rôle ces jeunes femmes racontent leur histoire, on a le cœur tordu de pitié et de révolte devant les traitements inhumains qu’elles subissent.
Quel perversité dans ce système où tout ce qui arrive de mal à l’homme vient de son épouse qu’il peut alors répudier.
J’avais lu que les femmes peules étaient les plus belles femmes du monde mais j’ignorais ce qu’elles vivaient.
Difficile à lire, mais il faut absolument aller au bout, pour comprendre ce que certaines femmes endurent, et se dire surtout que la lutte pour la dignité de la femme n’est pas finie…